Depuis sa transformation en coopérative en 2018, le Grenade procède tous les 2 ans à l’élection d’un binôme de cogérant·es. Cette année, à l’assemblée générale de janvier 2025, un nouveau duo doit être élu.
Pour réaliser cette élection, le Grenade utilise une méthode originale, bien connue des milieux de l’ESS : l’élection sans candidat… à la sauce Grenade. Explications.
De quoi s’agit-il ?
Ce type d’élection permet de choisir des personnes pour des rôles ou des fonctions (gérance, membre d’un conseil d’administration, responsabilité, etc.), selon des critères définis par le groupe. Ceux-ci sont liés à la nature du rôle à endosser et aux qualités requises pour le rôle.
Ce système s’appuie sur un constat : les caractéristiques ou qualités permettant de “gagner” une élection (par exemple, l’éloquence et le charisme) ne sont pas celles recherchées pour endosser certaines fonctions professionnelles.
Ainsi, grâce à ce mode d’élection, des personnes qui spontanément n’auraient pas candidaté pour le rôle ou la fonction concerné·e acceptent de l’assumer. Dans les entreprises du Grenade, l’adoption de ce système a bouleversé la sociologie des gérances par exemple : alors que les fonctions de cogérant·e étaient souvent endossées par des hommes (volontaires et candidats donc), l’élection sans candidat permet à de nombreuses femmes d’accéder à la gérance des SCOP.
Comment ça marche ?
Une élection sans candidat commence toujours par la définition précise de la mission ou du rôle à endosser par la personne : quels sont les attendus du rôle ? Quelles qualités sont requises pour bien exercer la fonction ?… Ensuite, un premier tour d’expression du groupe permet à chacun·e de proposer une personne qu’il ou elle juge apte à exercer la fonction. Ces propositions doivent être argumentées en s’appuyant sur la liste des qualités préalablement définies. A l’issue de ce tour et à l’écoute des arguments des un·es et des autres, les personnes peuvent modifier leur proposition. En dernier lieu, on demande aux personnes nommées de confirmer leur candidature ou de la retirer.
C’est ici que le Grenade se démarque du processus habituel qui prône une prise de décision par consentement pour aboutir au choix final. Pour éviter de trop longs cycles de propositions/objections/améliorations, le Grenade propose à ses membres un vote au jugement majoritaire.
Le jugement majoritaire
Ce mode de scrutin implique de placer chaque candidature sur une échelle de mentions (par exemple : ‘très bien’, ‘bien’, ‘assez bien’, ‘passable’, ‘insuffisant’, ‘à rejeter’). Plusieurs candidat·es peuvent recevoir la même valeur ou mention. Le résultat s’appuie sur la médiane et non sur la moyenne. La présence de la mention “à rejeter” permet aux votants d’exprimer un désaccord autrement qu’en s’abstenant ou en votant blanc. Au Grenade, on utilise généralement 7 valeurs différentes, mais le vote peut être d’autant plus nuancé que l’échelle des mentions est fine. Enfin, le nombre de candidat·es n’influence pas le résultat du scrutin : l’ajout ou le retrait d’un·e candidat·e ne change pas le·la gagnant·e. La pratique du “vote utile” n’a plus aucune raison d’être.
D’autres modes de scrutin existent bien entendu et certains membres de la coopérative ont testé récemment d’autres types d’élections (tirage au sort, notamment). Avec l’accroissement du nombre de ses associé·es, la SCIC Grenade a elle aussi fait évoluer son mode d’élection pour des raisons pratiques. Il demeure selon nous que l’élection sans candidat, associée au jugement majoritaire, est un axe fort de la vie démocratique de notre coopérative.