Travailler sans patron et sans hiérarchie, une belle utopie ?
C’est ce que tend à nous faire penser les observations du sociologue Albert Meister qui a parcouru le monde dans l’étude de collectifs autogérés et en est revenu désabusé, observant de nombreux mouvements égalitaires échouer et tomber dans les mêmes travers.
Notre conviction au Grenade : si elle n’est pas parfaite, l’organisation autogestionnaire reste préférable à l’organisation hiérarchique.
Pourquoi ? Parce que, d’après nos observations, la démocratie au sein de l’entreprise permet à l’intelligence collective de s’épanouir. Et celle-ci pousse le projet de l’entreprise vers la transition écologique et sociale.
Trop beau pour être vrai ? Vous êtes sceptique ?
Venez voir une réunion d’équipe hebdomadaire de l’une de nos coopératives : vous assisterez à des discussions essentielles sur le projet de l’entreprise, sur les conditions de travail, sur la relation aux producteurs et fournisseurs, sur le lien aux clients… “Est-il juste d’augmenter le prix du menu ? Faut-il travailler avec tel producteur local ? Peut-on augmenter nos horaires d’ouverture sans changer notre masse salariale, est-ce souhaitable pour le bien-être des salarié·es ?”
Croyez-le ou non, grâce au débat démocratique, ces discussions aboutissent très souvent à de hautes exigences en matière d’écologie et de soin aux humains liés à l’entreprise (salarié·es, fournisseurs, clients).
L’autogestion, à certaines conditions
Mais alors, Meister ??
Nous lisons les travaux du sociologue comme une mise en garde sur les travers de l’idéal autogestionnaire : par rejet des structures traditionnelles, on aboutit à la “tyrannie d’absence de structure” comme l’expliquent très bien Baptiste Mylondo et Simon Cottin-Marx dans leur dernier livre “Travailler sans patron”. On pourrait aussi évoquer le philosophe Luc Carton qui évoque l’écueil de “l’assemblée générale permanente”. En effet, l’absence de structure et de règles risque de laisser se déployer la bataille des égo, la domination des plus “forts” sur les plus “faibles”, et finalement la violence de tous contre tous…
Bref, l’autogestion oui ! Mais à certaines conditions :
> Une démocratie or-ga-ni-sée (et pour cela, nous vous renvoyons à la très précieuse formation que propose notre collègue, Maïa Souviron)
> Une autogestion associée à la propriété de l’outil de travail (bonjour, les scop et scic !) et au partage des fruits de ce travail
> Une autogestion qui n’oublie pas de penser et organiser la fonction employeur, trop souvent oubliée dans les organisations collectives horizontales (et pour cela, nous ne pouvons manquer de mentionner la très utile formation proposée par notre collègue, Dévina Azis).